Référentiel budgétaire et comptable M57 pour Paris, Lyon et Marseille : Éventualité de maintenir, temporairement, la présentation et le vote des états spéciaux selon le référentiel M14 ?

Par François Valembois

Publié le

Dans le cadre de l'obligation de passer à la nomenclature comptable M57 au 01/01/2024, nous souhaitons avoir des précisions concernant le vote des états spéciaux en conseils d'arrondissements.

En effet, les conseils d'arrondissements disposent d'un détail d'un mois à compter de la
notification des dotations financières par la maire centrale pour voter leurs états spéciaux en conseils d'arrondissement (Article L.2511-41 du CGCT).

Aussi, dans l'optique du passage à la nomenclature comptable M57 (au 01/01/2024) nous souhaitons savoir s'il est possible pour les conseils d'arrondissements de préparer leurs états spéciaux (budgets) 2024 à partir de la nomenclature comptable M14, de voter en M14 leurs états spéciaux (budgets) en conseils d'arrondissements et de transposer par la suite ces mêmes états spéciaux en nomenclature comptable M57 et de les faire voter par la mairie centrale lors du vote du budget primitif 2024 prévu en décembre 2023.

Est- il donc possible de voter en conseils d'arrondissement des états spéciaux en M14, de les transposer en M57 et de faire voter ces mêmes états transposés en M57 par la mairie centrale, ou ne faudrait-il pas faire voter aux conseils d'arrondissements ces états spéciaux (budgets) déjà transposés en nomenclature comptable M57 ?

Les états spéciaux devant être par ailleurs être annexés au budget primitif 2024 qui devra être voté par la mairie centrale en décembre 2023.

La généralisation du référentiel M57 est prévue pour le 1er janvier 2024. Toutefois, les textes relatifs à cette généralisation n’ont pas encore été publiés et en la matière, nombre de projets ont fait l’objet de rebondissements, de retards, voire de reports à une date… ultérieure (exemple des projets réguliers de revalorisation des valeurs locatives utilisées dans le cadre de la fiscalité directe locale).

Les précisions concernant les cas particuliers que sont Paris, Lyon et Marseille n'ont pas plus été données.

Pour ce qui concerne Paris, Lyon et Marseille, le code général des collectivités territoriales (CGCT) dispose (art. L.2511 41) : « Le maire d'arrondissement adresse au maire de la commune [...] l'état spécial de l'arrondissement adopté en équilibre réel. L'état spécial est voté par chapitre et par article […] » et « L'état spécial de chaque arrondissement est soumis au conseil municipal [...] en même temps que le projet de budget de la commune. »

Dans l’attente de la parution des textes définitifs relatifs à la M57, il semble difficile d’imaginer que l'on puisse soumettre en même temps au conseil municipal le budget de la commune présenté en M57 et les états spéciaux d'arrondissement présentés (et votés) en M14.

En effet, même si les règles budgétaires et comptables de la M14 et de la M57 ont des points communs, elles ne sont pas identiques et ont chacune leurs spécificités (pluri-annualité, fongibilité des crédits, autorisations de programme et autorisation d'engagement, dépenses imprévues, etc.).

Quelles solutions sont envisageables ?

1- Interroger le représentant de l’État au titre du « pré-contrôle » de légalité.

Le représentant de l'État qui sera amené à exercer, après le vote du budget, le contrôle budgétaire et
le contrôle de légalité peut auparavant, dans le cadre de sa mission de conseil aux collectivités, apporter des précisions juridiques sur ce cas particulier. Cela donnera d’ailleurs un éclairage sur la position qu’il pourrait prendre, une fois le budget adopté, au titre des contrôles de légalité et budgétaire. Toutefois, sa réponse ne l’engage nullement pour l’avenir.

2- Recourir au rescrit administratif, prévu par l'article L.1611 1 du CGCT.

Cet article dispose : « Avant d'adopter un acte susceptible d'être déféré au tribunal administratif, les collectivités territoriales ou leurs groupements ainsi que leurs établissements publics peuvent saisir le représentant de l'État chargé de contrôler la légalité de leurs actes d'une demande de prise de position formelle relative à la mise en oeuvre d'une disposition législative ou réglementaire régissant l'exercice de leurs compétences ou les prérogatives dévolues à leur exécutif. »

Dans ce cas, si l'acte est conforme à la prise de position formelle, le représentant de l'État ne peut pas, au titre de la question de droit soulevée et sauf changement de circonstances, le déférer au tribunal administratif.

Toutefois, ce dispositif n'est possible que pour les aspects de l'acte (le budget) qui relèvent de la compétence du tribunal administratif (contrôle de légalité) et non de la chambre régionale des comptes (contrôle budgétaire).

La Cour des comptes ayant rappelé (1) que le contrôle budgétaire vise « à contrôler le respect des règles budgétaires, notamment en matière de date limite du vote du budget primitif, d’équilibre réel des budgets et du compte administratif ou de l’inscription des dépenses obligatoires », on peut penser, sous réserve de l’appréciation souveraine du juge, que le respect, ou non, de l’application du référentiel M57 relève davantage du contrôle de légalité pour lequel le représentant de l’État procède à un examen du fond (légalité interne) ou de la forme (légalité externe) de l’acte pour déterminer si, selon lui, il révèle des irrégularités.

Néanmoins, cette solution présente un inconvénient majeur dans le cas présent : si la demande de prise de position formelle doit être écrite, précise et complète, qu’elle doit comporter la transmission de la question de droit sur laquelle la prise de position formelle est demandée, elle doit aussi être accompagnée du projet d'acte.

Dans le cas d espèce, cela présente des difficultés, d’une part, compte-tenu des délais d’élaboration du projet de budget et des états spéciaux et, d’autre part, du fait que le représentant de l’État dispose d’un délai de 3 mois pour apporter sa réponse à la question posée. Le silence gardé par le représentant de l'État pendant trois mois vaut absence de prise de position formelle.

Sauf à ce que le représentant de l’État s’engage verbalement à faire connaître sa position très rapidement, le délai de trois mois dont il dispose est difficilement compatible avec le délai d’un mois que doivent respecter les conseils d’arrondissements (à compter de la notification des dotations financières par la mairie centrale) pour voter leurs états spéciaux.

3- L’adoption des états spéciaux en M57 avec, pour information, une présentation complémentaire en M14

La DGCL fournit des tables de transposition et de correspondance vers les plans de comptes M57
(2). Si la généralisation du référentiel budgétaire et comptable M57 est effective le 1er janvier 2024, les états spéciaux peuvent être élaborés selon le référentiel M57 et être assortis des mêmes états présentés selon le référentiel M14, grâce aux tables de transposition et de correspondance. Cela permettra aux élus d’arrondissement de disposer des deux versions et de se référer à la présentation M14 si la présentation M57 n’est pas suffisamment explicite pour eux.

4- Solliciter, pour avis, le comptable public.

Le comptable public de la collectivité, au titre de sa mission de conseil, peut apporter à l’exécutif des informations et conseils sur les possibilités, ou non, d e maintenir les états spéciaux présentés et votés selon le référentiel M14.

CONCLUSION

Dans l’attente de la parution des textes définitifs relatifs à la généralisation du référentiel budgétaire et comptable M57 et sauf accord explicite du représentant de l’État chargé des contrôles de légalité et budgétaire, il ne semble pas possible que les états spéciaux soient votés par les conseils d’arrondissements selon une présentation en M14, puis qu’ils soient transposés en M57 pour être alors soumis au conseil municipal en même temps que le projet de budget de la commune.

Il apparaît préférable d’établir et de faire voter les états spéciaux en appliquant le référentiel budgétaire et comptable M57.