Monnaie locale : oui pour acheter sa baguette de pain, non pour payer ses impôts
Et si demain les collectivités territoriales percevaient des recettes ou effectuaient des dépenses en monnaies locales telles que l’Eusko, le Krôcô ou le Retz’l ? Un arrêt récent du Conseil d’État enterre cette possibilité.
En l’espèce, la ville de Bayonne passe une convention pour régler certaines dépenses dans une monnaie locale basque développée par l’association Euskal Moneta, l'eusko. Mais le préfet du département attaque la mairie en justice. Le 4 mai 2018, la cour administrative de Bordeaux suspend alors cette convention, estimant qu'une commune ne peut payer que dans une monnaie nationale. Un pourvoi en cassation devant le Conseil d'État sera sûrement formé.
D’un côté, certains voient dans ces devises un atout pour dynamiser le tissu économique local, un moyen de relocaliser de manière durable une activité économique et renforcer le lien social. D’autres considèrent que ces monnaies volatiles conduisent à une perte de confiance dans la monnaie nationale. Dans son rapport de 2015 sur ces nouvelles monnaies, le Conseil économique social et environnemental anticipe ainsi le risque financier que cela induit pour l’État du fait que la TVA n’est pas prélevée sur la plupart des transactions en monnaie locale.
Pour rappel, les monnaies locales sont complémentaires à l’euro. On en compte plus d’une quarantaine en France. L’article 16 de la loi du 31 juillet 2014 relative à l'économie sociale et solidaire, dit loi Hamon, encadre l’utilisation de ces monnaies. Celles-ci ne sont utilisées que sur un territoire restreint. Contrairement au bitcoin, les monnaies locales ne sont utilisées comme moyens de paiement que pour certains services ou marchandises qui sont à l’initiative de structures relevant de l’économie sociale et solidaire. La valeur de ces monnaies locales complémentaires (MCL) est généralement directement fixée sur celle de l'euro. La grande majorité de ces monnaies sont émises et gérées par des associations.
L’essor des monnaies locales, impulsé par la crise économique de 2008, n’est pas franco-français. Au Royaume-Uni, les habitants de Bristol peuvent payer leurs taxes locales en monnaie locale appelée « Bristol pound ».
Source :
- « Nouvelles monnaies : les enjeux macro-économiques, financiers et sociétaux », CESE, 15 avril 2015